12èmes RENCONTRES LITTÉRAIRES
DANS LE JARDIN DES PRÉBENDES, À TOURS

Vendredi 20 août 2010, de 17 h 30 à 19 h

 

Rodin écrivain

Portrait d'Auguste Rodin par Catherine Réault-Crosnier.

 

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Chacun connaît le célèbre sculpteur français, Auguste Rodin. Il conjugua l’harmonie des formes à la beauté du mouvement et de l’expression. Mais qui peut citer le titre d’un de ses livres ? Et pourtant on retrouve à travers son écriture, son style, sa force, sa fougue, tout son univers et sa manière de penser si riche aussi bien sur le plan descriptif que philosophique.

Rodin aimait venir en Touraine, en particulier au château de l’Islette où il séjournait avec Camille Claudel, son modèle, son amante, elle aussi artiste de grande valeur, passionnée par l’art. Rodin a écrit durant ses séjours tourangeaux. Il était donc normal qu’une rencontre littéraire soit consacrée à ce titan, bourreau de travail, artiste dans l’âme, homme de passion.

Le public, le 20 août 2010, lors des 12èmes Rencontres littéraires dans le jardin des Prébendes à Tours.

 

Sa biographie

Rodin a eu une enfance pauvre, au dernier étage mansardé du 7, rue de l’Arbalète à Paris. Son père, normand, était garçon de bureau à la préfecture, sa mère, lorraine, faisait des ménages. Rodin n’était pas doué pour les études.

À quinze ans, il entre à l’École spéciale de dessin et de mathématiques, également appelée la « Petite École » (future École Nationale des Arts décoratifs) où il apprend les règles de l’architecture gothique, Renaissance et classique.

À dix-sept ans, il échoue par trois fois au concours d’entrée à l’école des Beaux-arts. Il travaille chez plusieurs décorateurs. En 1862, il entre comme novice chez les pères du Saint-Sacrement. En 1864, il loue un atelier au Jardin des plantes et réalise son premier buste, celui de son père. Sa maîtresse officielle est Rose Beuret dont il aura un enfant ; à partir de 1871, il les abandonne pour suivre le sculpteur Carrier-Belleuse à Bruxelles, pendant plusieurs années. Rose Beuret le rejoindra. En 1874, il participe au décor du palais des Académies à Bruxelles. Au salon de Bruxelles, son Homme au nez cassé est bien accueilli. Il voyage en Italie (en 1875). De 1879 à 1882, il travaille à la manufacture de Sèvres. Il occupe son premier atelier au Dépôt des Marbres au 182, rue de l’Université, que l’État met à sa disposition ; il le gardera jusqu’à sa mort. En 1880, l’état français lui achète une épreuve du Saint-Jean-Baptiste en bronze.

La même année, Rodin reçoit du musée des Arts Décoratifs, la commande d’une pièce immense, La Porte de l’enfer. Il passe alors une année à méditer « La Divine Comédie » de Dante. (http://www.patrick-de-bayser.com/pages/rodin.pdf, p. 1) Puis le succès ne le quitte plus et il réalise de nombreuses commandes parmi lesquelles figurent ses œuvres les plus connues comme les Bourgeois de Calais. En 1882, il crée Le Penseur, sculpture qui restera parmi ses plus célèbres.

En 1883, Camille Claudel âgée de dix-neuf ans fait la connaissance de Rodin qui lui donne des cours ; l’année suivante elle lui sert de modèle ; peu à peu elle deviendra son amante. En 1890, Rodin la retrouve en Touraine, au château de l’Islette, près d’Azay-le-Rideau. Dès le début de leur relation, Rose Beuret, maîtresse attitrée de Rodin, n’accepte pas cet état de fait d’où distensions et jalousies ; de Paris où elle vit, elle essaie d’éloigner Rodin de Camille Claudel.

En 1891, il obtient la commande du monument à Balzac. (Gilles Néret, Auguste Rodin, Sculptures et dessins, p. 89)

En 1892, Camille Claudel et Rodin cesse de cohabiter mais Rodin continue de voir Camille de temps en temps pendant encore quelques années (Jacques Cassar, Dossier Camille Claudel, p. 186). En 1893, Rodin a transféré le domicile de son couple légitime à Bellevue. Il rencontre aussi Aristide Maillot, Antoine Bourdelle. En 1894, il est invité chez Monet à Giverny où il rencontre Cézanne.

Après 1898, Rodin a rompu avec Camille Claudel et reprend une vie plus calme avec Rose Beuret ; il habite sur les coteaux de Meudon, dans un pavillon Louis XIII de briques rouges et pierres de taille, mais cela ne l’empêche pas de continuer à faire la conquête de bien des femmes et de faire la cour même de loin, à sa « féroce amie ». (http://www.patrick-de-bayser.com/pages/c_claudel.html, p. 4).

En 1901, a lieu à Prague une grande exposition de Rodin. L’artiste a maintenant une reconnaissance internationale. Son Penseur est placé devant le Panthéon en 1906. Rilke qui fut son secrétaire (du 15 septembre 1905 au 12 mai 1906) lui fait découvrir l’hôtel Biron (proche des Invalides) en 1908 et le sculpteur s’y installe.

Il continue d’être connu et reconnu dans le monde entier. Une salle du Metropolitan Museum de New York lui est consacrée (1912). En 1914, il publie Les Cathédrales de France, livre qu’il illustre lui-même. L’année suivante, il exécute le buste du pape Benoit XV.

En décembre 1916, à soixante-seize ans, il fait don de ses œuvres à l’État français ; l’Assemblée nationale accepte, en pleine guerre et vote l’établissement du musée dans l’hôtel Biron.

En janvier 1917, il épouse Rose Beuret, sa compagne depuis le début ; il meurt le 24 novembre 1917. Camille Claudel lui survivra jusqu’en 1943 mais depuis 1913, elle avait sombré dans la folie.

Le musée Rodin ouvre ses portes en 1919. Rodin n’a jamais perdu sa notoriété même après sa mort ; il continue de susciter l’étonnement, l’émerveillement devant l’intensité artistique, le foisonnement de vie et de mouvement de ses œuvres.

 

Rodin en Touraine

En 1890, Rodin qui a vingt-quatre ans de plus que Camille Claudel, la retrouve en toute discrétion, sur les bords de la Seine, près de la gare d’Orléans, pour partir en Touraine, au château de l’Islette. Il aime la beauté de son modèle. À cette époque, il est devenu un sculpteur renommé, décoré de la Légion d’Honneur, elle reste une simple élève. Ils descendent du train à Tours pour prendre leur correspondance pour Azay-le-Rideau et s’arrêtent à Cheillé. Une domestique les attend pour les conduire au château de Mme Courcelle, la propriétaire d’alors, où ils seront hébergés. (Paul-Jacques Lévèque-Mingam, Rodin et La Loire, pp. 7 à 10)

Mais retournons au présent : Mme Madeleine Michaud s’est investie passionnément dans ce château dans laquelle elle vit depuis 1965. Elle en était encore la propriétaire en 2009 et m’en a parlé avec passion. À sa demande, son fils, Pierre-André Michaud vient de lui succéder en 2010 et ouvre le château aux visiteurs en juillet et août, chaque année (château de l’Islette, D 57, 9 route de Langeais, 37190 Azay-le-Rideau, 02 47 45 40 10, contact@chateaudelislette.fr, www.chateaudelislette.fr). Je remercie Mme Michaud qui m’a fourni ces précieux renseignements sur l’histoire de ce château (entretien du 26 novembre 2009).

Cette demeure bâtie en 1530 pour sieur Barjot, baron de Maillé, avait des points communs avec le château d’Azay-le-Rideau (construit en 1518) d’autant plus que ce sont les mêmes ouvriers qu’à Azay-le-Rideau. Il est facile de faire ce rapprochement, en regardant leurs façades. Du point de vue architectural, on peut considérer le château de l’Islette comme le frère aîné d’Azay-le-Rideau.

Le château est constitué de deux parties construites sur une île de dix-neuf hectares, entourée par un méandre de l’Indre qui apporte une touche romantique. Côté nord, la partie ancienne du XVème siècle est ornée d’un damier de brique et de pierre ; ce sont les vestiges d’un manoir médiéval qui a dû subir un incendie. Elle possède un corps de logis avec une tour d’escalier, monumentale carrée du XVème remarquable par ses dimensions.

Sur l’autre façade, côté sud, on découvre un corps de bâtiment construit au XVIème, à la Renaissance, couronnée de mâchicoulis et de lucarnes Renaissance (chemin de ronde ornemental), avec deux grosses tours massives dont les murs font 2 m 30 d’épaisseur ! Cette façade possède une tour d’escalier polygonale.

Les toitures des tours pointues à l’origine, sont surprenantes car elles sont en forme de cloches. Le propriétaire du XIXème siècle, M. Dupuy, les avait fait refaire ainsi par un souci d’économie. Les douves ont été comblées à la même époque et le pont-levis supprimé.

À droite, après quelques bosquets d’arbres, un corps de ferme rappelle que dans ce château, on pouvait vivre en autarcie avec son moulin, sa ferme, ses gens.

On pénètre à l’intérieur du château par une large porte creusée au milieu de la façade, ancien hall de passage pour les calèches ; cette porte est surmontée d’un cartouche où sont représentés deux angelots, un heaume, une couronne de fleurs (symbole de la Renaissance) et les blasons de la famille Barjot. La chapelle située au rez-de-chaussée, a de jolies voutes d’ogives et occupe la tour est.

La chambre de Camille Claudel et Rodin se situe au premier ou au deuxième étage (ou à côté de l’oratoire) ; un escalier à vis mène aux étages. Rodin affirme qu’ils sont venus là pour sculpter en toute tranquillité mais c’est aussi pour y cacher leurs amours.

Au premier étage, la grande salle historiquement appelée « Salle Saint-Paul », spacieuse (17 m de long sur 9m de large et 6 à 7 m de haut), est éclairée par quatre fenêtres. On y admire une imposante cheminée Renaissance, un plafond Renaissance à caissons magnifiquement décoré de poutres énormes, ornées d’une frise de vingt-six blasons (postérieurs à 1628). Ce sont les devises et blasons des familles seigneuriales qui ont vécu ici jusqu’à la Révolution (alliance des familles Carman et Maillé). Ce décor est en harmonie avec les peintures du XVIIème siècle des soubassements et du plafond à caissons, avec des paysages, des motifs et de petites fleurs, celles de la vallée de l’Indre. Les poutres sont peintes de fleurs et d’allégories. C’est dans cette salle que Camille Claudel réalisa le buste de « La petite châtelaine de l’Islette », la fille de Mme Courcelle.

Auguste Rodin profite de son séjour pour esquisser quelques croquis des châteaux de Touraine. Camille Claudel est alors son inspiratrice, son modèle, sa confidente. (NR du 9 octobre 2009)

Pendant l’été 1891, Rodin revient au château de l’Islette pour se documenter avant de réaliser sa sculpture de Balzac dont il vient d’obtenir la commande mais Rodin s’absente souvent du château, pour rencontrer des gens comme par exemple un voiturier, Estager, qui est considéré à Azay-le-Rideau, comme le sosie de Balzac (Paul-Jacques Lévèque-Mingam, Rodin et La Loire, pp. 19 et 20). Comme ses croquis le prouvent, Rodin a sillonné la Touraine et ses alentours avec plaisir ; il a apprécié la campagne, les rives de la Loire et du Loir, les églises, les abbayes, les châteaux et plus particulièrement ceux de la Renaissance. Il va de Châteaudun à Brissac et Angers (id., p. 20), à Valençay. Les dessins de Rodin sont rarement accompagnés d’indications de lieux et encore plus rarement datés. On reconnaît le château de Meillant (Cher) (id., p. 27), la cathédrale de Bourges (id., p. 29), l’église de Meung-sur-Loire (id., p. 34), le château de Châteaudun (Eure-et-Loir) (id., p. 36) mais on ne peut pas toujours donner le nom à partir d’une façade, une fenêtre, un détail (id., p. 21). Cela ne semblait pas être son problème. Parmi les châteaux de la vallée de la Loire qu’il a dessinés, il faut citer ceux de Chenonceau (id., p. 48), de Villandry (id., p. 56), d’Azay-le-Rideau (id., p. 58), de l’Islette bien sûr (p. 62), de Coulaine à Beaumont-en-Véron (id., p. 24) qui était à quelques heures de promenade de celui de l’Islette, d’Ussé (id., p. 65), de Montsoreau (id., p. 67), de Saumur (id., p. 69), de Blois (id., p. 38), de Chambord (id., p. 42), de Chaumont-sur-Loire (id., p. 46). Il représente aussi l’église de Veretz (construite au XVIème siècle) (id., p. 30), la tour Saint-Antoine de Loches (id., p. 50), le clocher de l’église Saint-Florentin d’Amboise (id., p. 51), le prieuré de Saint-Jean-de-Grais (id., p. 53), l’abbaye de Beaulieu-lès-Loches (id., p. 53), la façade de la collégiale de Montrésor (id., p. 40), l’abbaye de Sainte-Radegonde à Marmoutier (id., p. 55) et la tour Charlemagne à Tours (id., p. 54).

Rodin et Camille Claudel reviendront en Touraine, au cours des étés suivants, sans que l’on puisse préciser les dates et durées de leurs séjours. Une lettre annotée nous permet de savoir qu’il était présent au comice agricole de Chinon. En 1892, Camille reviendra seule en ce lieu et probablement pour y cacher une grossesse et avorter. Rodin la rejoint parfois mais les scènes de jalousie et de violence sont fréquentes alors Rodin qui la trompe régulièrement, choisit la fuite. En 1896, les étés heureux en Touraine ont pris fin en même temps que l’idylle de Camille Claudel et de Rodin. Camille y retournera mais Mme Courcelle ne verra plus d’un bon œil ces visites, lassée des disputes répétées puis de la séparation des amants et des dégâts matériels occasionnés par la préparation des sculptures. Cette passion est destructrice pour Camille que sa famille finira par faire interner au vu de son délabrement physique et psychique. (Paul-Jacques Lévèque-Mingam, Rodin et La Loire, pp. 18, 19 et 72)

Bien après cette passion, Rodin est revenu en Touraine comme en témoigne une de ses lettres datée du 29 mars 1910 où il dit à sa compagne de lui écrire poste restante à Tours. Il fit en effet, un voyage dans le Loir-et-Cher et dans l’Indre-et-Loire, de la fin mars au 2 avril 1910 (Auguste Rodin, Correspondance, tome III, p. 98).

 

Le regard des autres

Émile Mâle, historien d’art français, dira de son livre sur les Cathédrales de France, mal accueilli par la critique : « Le livre de Rodin sur les cathédrales de France n’est pas un livre : ce sont des notes frémissantes, de nobles pensées, de belles métaphores (…). N’y cherchez ni l’histoire des cathédrales, ni les lois de leur équilibre, ni l’explication de leur encyclopédie de pierre : vous seriez déçu. » (Émile Mâle, Arts et Artistes du Moyen-Âge).

Paul Gsell, journaliste qui l’a interviewé, le décrit ainsi : « Je le revois pétrissant dans la glaise de petites ébauches rapides. (…) Ces esquisses lancées d’un jet le passionnent, parce qu’elles lui permettent de saisir au vol de beaux gestes dont la vérité fugitive pourrait échapper à une étude plus approfondie. » (Auguste Rodin, L’art, Entretiens réunis par Paul Gsell, p. 24) « Il suit du regard ses modèles ; il savoure silencieusement la beauté de la vie qui joue en eux ; (…) Alors vite il prend son argile… et une maquette est bientôt sur pied ; puis avec autant de promptitude, il passe à une autre qu’il façonne de même. » (id., pp. 25 et 26) Il est passionnant de voir Rodin au travail, fouiller au plus profond de l’être, pour en extraire l’âme et la traduire en mouvement, à travers la beauté d’un corps.

En 1924, Émile Henriot situe ainsi Rodin : « Ceux qui ont eu le bonheur d’approcher Rodin et de l’entendre parler (…) ont (…) été frappés par le solide bon sens et la subtilité d’esprit de ce rude manieur de pierre. » (id., quatrième de couverture) Si Rodin a nié le rôle de l’inspiration, c’est parce qu’il la remplace par « la patience, la sagesse, l’attention, la volonté et l’honnête labeur de l’ouvrier. » Il met donc le travail au-dessus de tout et le métier au-dessus du génie. (id., quatrième de couverture), ce qui n’est pas habituel mais qui témoigne bien de sa réflexion et de son élan créatif. Oui, sa sculpture n’est pas juste de la reproduction même menée à la perfection, elle est animée de mouvement, de vie, de pensée, de travail et de persévérance.

Avoir l’avis d’un poète complète les impressions données sur Rodin ; citons Rainer Maria Rilke : « En ne perdant pas de vue le modèle et en abandonnant complètement le papier à sa main expérimentée et vive, il dessina une foule de gestes jamais vus, toujours négligés, et il apparut que la force d’expression qui s’en dégageait était immense. » (http://www.patrick-de-bayser.com/pages/rodin.pdf, p. 2)

Au XXIème siècle, Rodin n’est pas passé de mode. Un film sorti en 1989, « Camille Claudel », témoigne de l’intérêt persistant pour ces deux sculpteurs actuellement. Ce film a eu un grand succès et a reçu cinq Césars dont celui du meilleur film et celui de la meilleure actrice pour Isabelle Adjani qui jouait le rôle de Camille Claudel. Gérard Depardieu jouait le rôle de Rodin.

 

Son œuvre littéraire et artistique

Pour Rodin, la littérature et l’art pictural se complètent, s’enchevêtrent et se superposent. Il exprime ses idées autant par la parole que par le dessin ou la sculpture. Il a dit d’ailleurs à propos de Jean-Baptiste Houdon : un bon buste « vaut une biographie ». (Auguste Rodin, L’art, Entretiens réunis par Paul Gsell, p. 164)

Ses sculptures les plus célèbres sont Les Bourgeois de Calais (1884), La Porte de l’Enfer (1885), le Monument à Victor Hugo (1897), Balzac (1998), Le Penseur (1904), L’Homme qui marche (1907).

La pensée littéraire de Rodin a pu être transmise ; il a écrit ses pensées sur des carnets, des articles pour des journaux, a répondu aux questions et ses notes ont été conservées. Nous pouvons citer « La leçon de l’antique » (1904), « Vénus. A la Vénus de Milo » (1914), « Le Parthénon et les cathédrales » (1905), « La danse de Civa » (1921). (http://www.inha.fr/spip.php?rubrique347, p. 5)

Dans le livre Éclairs de pensée, Augustin de Butler présente en 1983, des textes de Rodin jamais réédités qui montrent ce que l’art de Rodin doit « à l’antique, au gothique, au baroque, ou encore à l’Asie » et aussi « l’art d’admirer » (Augustin de Butler, Présentation de Auguste Rodin, Éclairs de pensée, p. 9).

Le journaliste Paul Gsell a demandé l’autorisation à Rodin de l’interviewer, pour mieux comprendre sa démarche artistique et Rodin a accepté de traduire avec des mots, ce qu’il bâtissait en sculpture ; Paul Gsell a pu ensuite publier le livre Rodin, L’Art qui est très riche en témoignages et permet de mieux cerner sur la manière de penser et de créer de ce sculpteur.

Par ailleurs, Rodin peut être qualifié d’historien d’art au vu du grand nombre d’écrits à ce sujet, suite à des interviews et de très nombreuses lettres. (http://www.inha.fr/spip.php?rubrique347, p. 3)

En 1914, il publie Les Cathédrales de France ; Rodin se servira alors de ses innombrables dessins créés en Val de Loire, lors de ses séjours près de Camille Claudel. Ce livre est étonnant car il se sert ici des cathédrales pour faire passer son message personnel, ses considérations sur la philosophie et l’amour de la femme liée à l’art dans une ambiance mystique, comme par exemple quand il décrit une femme en prière dans une cathédrale : « admirer cette attitude en si parfaite harmonie avec la nef tout entière, ample cadre destiné à cet unique portrait (…). Dans les Cathédrales, toutes les femmes sont des Polymnies, tous leurs mouvements retournent à la beauté. Cette architecture projette sa gloire sur elles comme un tribut de reconnaissance. » (Les Cathédrales de France, réédition de 1921, p. 90). Après des notions générales, chaque chapitre est associé à une cathédrale qu’il caractérise dès le début. Ces cathédrales vues sous sa plume d’écrivain, semblent prendre vie à l’image d’une femme agenouillée : « Vue de trois-quarts, la Cathédrale de Reims évoque une grande figure de femme agenouillée, en prière. » (id., p. 129).

Devinez à qui il compare celle d’Amiens : « C’est une femme adorable, cette Cathédrale, c’est une Vierge. » (id., p. 110) Pour celle de Nevers, il nous dit : « Cette Cathédrale est l’échafaudage du ciel. » (id., p. 105) Dans celle de Soissons, « Il n’y a point d’heure dans cette Cathédrale ; il y a l’éternité. » (id., p. 125) Dans celle de Reims : « Elle est là, immobile, muette ; je ne la vois pas : nuit noire. Mes yeux s’habituent, je distingue un peu, et c’est le grand squelette de toute la France du Moyen Âge qui m’apparaît. » (id., p. 128) Pour celle de Chartres, « elle m’est apparue, aujourd’hui, toute nouvelle, plus belle, plus brillante que jamais, et je me suis mis à l’étudier comme si je la voyais pour la première fois. » (id., p. 161)

Il existe une unité de pensée dans ses sculptures et ses écrits pour un même message, les mêmes sensations, les mêmes émotions, les mêmes sentiments. Analysons donc ses textes d’après les thèmes indispensables pour caractériser son œuvre (l’importance du travail, l’art de bâtir, le don d’observation, l’amour de la nature, la Touraine, le mouvement, le dessin et les couleurs, la pensée, la poésie, la sensualité, l’attrait de la chair, l’amour de la femme, l’aspect philosophique, le mystique, la vieillesse, la recherche du beau, la vérité avant la beauté).

 

Rodin écrivain

Il est intéressant de voir comment Rodin a écrit et pourquoi.

L’importance du travail et l’art de bâtir

Rodin est avant tout un bâtisseur. S’il nous dit : « Travaillez avec acharnement » (Auguste Rodin, L’art, Entretiens réunis par Paul Gsell, p. 244), ce n’est pas une boutade. L’importance du travail est essentielle pour lui. Elle prime sur tout. Par exemple, lorsqu’il réalise son buste de « Victor Hugo », celui-ci avait un mauvais souvenir d’un autre sculpteur, aussi il lui dit : « (…) je ne poserai pas. Je ne changerai pour vous aucune de mes habitudes : arrangez-vous comme il vous plaira. » (id., pp. 134 et 136) Rodin vient et crayonne un grand nombre d’esquisses ; il s’installe dans la véranda pour sculpter mais comme Victor Hugo était dans le salon, il fait des va-et-vient incessants pour capter l’intériorité de l’écrivain. Parfois il arrive dans la véranda et repart à nouveau voir son modèle s’il n’est pas sûr du résultat. C’était un travail énorme et délicat mais Rodin ne se plaignit pas tant il est passionné par son œuvre (id., p. 136). Lorsqu’il obtient la commande de la Porte de l’Enfer pour le futur musée des Arts Décoratifs, il accepte ce travail de titan et esquisse cent fois, mille fois un dessin pour représenter le tumulte. Le musée Rodin conserve sept mille dessins préparatoires ! Il travaillera toute sa vie à ce projet mais il ne terminera jamais cette œuvre colossale.

 Dans son livre sur Les Cathédrales de France, il n’est pas insensible à l’union de la beauté et de la force qui tient presque du miracle architectural. Pour lui, la cathédrale est symbole de solidité : « Il y a dans la Cathédrale toute la simple beauté du menhir, qui l’annonce. » (Les Cathédrales de France, p. 44). À travers les cathédrales, il admire l’art tendu vers l’éternité.

 

Le don d’observation

Rodin se qualifie de « chercheur de vérité et guetteur de vie » (Auguste Rodin, L’art, Entretiens réunis par Paul Gsell, p. 27). Il dit : « (…) il serait impossible à un modèle de conserver une attitude vivante pendant tout le temps qu’on mettrait à le mouler. (…) je garde dans ma mémoire l’ensemble de la pose et je demande sans cesse au modèle de se conformer à mon souvenir. » (id., p. 28). L’art ne peut se concevoir sans le don d’observation qui est le premier stade avant la création. Voir puis ressentir enfin transmettre l’émotion : « (…) moi je reproduis en outre l’esprit, (…) » (id., p. 28) Rodin en est convaincu, pour lui, ce qui est fondamental, c’est « de voir » : « (…) l’artiste n’aperçoit pas la Nature comme elle apparaît au vulgaire, puisque son émotion lui révèle les vérités intérieures sous les apparences. (…) Il ne s’agit que de voir » (id., p. 29). « L’artiste (…) voit : c’est-à-dire que son œil enté sur son cœur lit profondément dans le sein de la Nature. Voilà pourquoi l’artiste n’a qu’à en croire ses yeux. » (id., p. 30)

Rodin nous dit de ne pas être passif devant la beauté : « Dieu n’a pas fait le ciel pour que nous ne le regardions pas. La science est un voile : levez-le, voyez ! » (Les Cathédrales de France, p. 20) Mais il ne suffit pas de voir, il faut observer : « Il est intéressant d’observer comment les nuages s’étendent ou se resserrent, s’éparpillent, se rassemblent. Telles des existences humaines, des amours. » (id., p. 21) Savoir observer, c’est pouvoir prendre du recul vis-à-vis de ce que l’on voit : « Mais le plus beau du paysage, c’est l’éloignement qui le donne ; c’est-à-dire que la beauté supérieure réside dans les effets de la profondeur. » (id., p. 23)

 

L’amour de la nature

Si Rodin a tant le don d’observation, c’est parce qu’il est passionné par celle-ci. Dans ses esquisses et dessins, on retrouve le sens de la précision, de la recherche. Il entre en communion avec la nature et transmet ce qu’il ressent : « Matinée de première communion : gelée froide, brouillard lumineux. » (id., p. 34) Il se retrouve lui-même avec ses états d’âme et il humanise la nature : « Cet arbre a reçu tant de coups de vent qu’il porte des profils de misère. » (id., p. 34) Mais la nature peut être aussi un baume pour le cœur : « Le soleil froid vient aussi : nous sommes aujourd’hui avec ce grand médecin, la Nature. » (id., p. 35)

 

La Touraine

Rodin a aimé la Touraine en amoureux : « Cette matinée est calme jusqu’aux derniers horizons. Tout repose. Partout de pleins effets de lenteur, d’ordre. Le bonheur est visible partout. Brume colorée et embaumée de beau temps. Trouve-t-on hors de ces contrées, cette égalité rassurante, réconfortante, de l’air et de la lumière ! » (Auguste Rodin, Éclairs de pensée, p. 10)

Il a esquissé un grand nombre de croquis sur des monuments avec beaucoup de minutie, privilégiant parfois un détail à une vue d’ensemble. Il y a préparé sa sculpture de Balzac et en a réalisés d’autres.

Parallèlement, il a aussi su nous dire avec des mots, la joie de son amour, son plaisir devant une nature en harmonie avec ses pensées et son sentiment de paix :

« AU PAYS DE LA LOIRE

La Loire, cette veine aortique de notre France !
Fleuve de lumière, de vie doucement heureuse !
Cette matinée est calme jusqu’aux derniers horizons. Tout repose. Partout de pleins effets de lenteur, d’ordre. Le bonheur est visible partout. Brume colorée et embaumée du beau temps.
(…)
Ce gris fin, ce gris doux de la Loire sous les nuages, ces toits gris de la ville, ce pont gris de vieille pierre…
Un soleil irrésolu éclaire capricieusement le paysage.
(…) j’ai vu le ciel même, qui verse un bonheur bleu. Comme des feuilles d’acanthe, des nuages occupaient toute la droite, s’élançant par bonds légers, comme des vols d’anges gothiques.
Journée glorieuse. Loire d’acier, moirée dans toute sa largeur.
O surtout la jeunesse de ce ciel ! Sa fleur, son bleu, et la gaîté douce de ses flancs habitants, les nuages !
Tout le bonheur de mon jadis me revient.

Ce chemin bordé d’ombrages, qui venait à nous, s’en retourne avec ses arbres.

La Loire en écharpe, en ruban d’argent s’éteint dans le sous-bois des saules et des peupliers ; verdures au premier plan. Dans la prairie ces forteresses de peupliers ! – La mousse jaune tache harmonieusement la pierre et l’arbre grisâtres.
(…)
Trois allées de vieux tilleuls. C’est absolument la triple nef de la Cathédrale.
(…)
Comme on regarde longuement sa maîtresse, avant de se séparer d’elle, comme on se retourne à plusieurs reprises pour la revoir encore, et encore, je quitte ces paysages comme on se détache d’un cœur aimé, aimant. Je les laisse en pleine gloire ! »

(Les Cathédrales de France, pp. 29, 30 et 31)

Oui, Rodin chante avec des mots harmonieux et poétiques, la Touraine. Rodin parle de la Loire comme d’une « veine aortique », car la Loire bat au rythme des pulsations de l’eau comme à celui de son amour tumultueux. La Loire apporte de la lumière, de la joie, du repos comme la sérénité des paysages dont il n’est pas le seul à avoir apprécier la lumière. Turner à son époque, avait été subjugué par cette lumière à nulle autre semblable. Rodin est amoureux de la Loire comme d’une femme et cet amour est comme un miroir de son amour envers Camille Claudel. Cet amour a un côté mystique quand il la compare à une « Cathédrale ». La Loire lui permet d’exprimer sa passion et son amour inaltérable envers Camille Claudel même si concrètement il n’est plus. Il quitte la Loire comme il délaisse son aimée, en gardant un souvenir ébloui de cet amour, « (…) je quitte ces beaux paysages comme on se détache d’un cœur aimé, aimant. Je les laisse en pleine gloire ! » (id., p. 31).

Rodin se sert de ce qu’il aime pour parler de la femme : femme et Loire sont liés pour lui : « Sur les bords de la Loire, notamment, on reconnaît souvent la fraîcheur originelle de la race en d’admirables exemplaires féminins. » (id., p. 39)

 

Le mouvement

Ce n’est pas par hasard qu’une tête de chapitre du livre Rodin, L’art de Paul Gsell, s’intitule « Le mouvement dans l’art » (Auguste Rodin, L’art, Entretiens réunis par Paul Gsell, p. 63). Rodin nous dit : « L’art n’existe pas sans la vie. » (id., p. 64) ou bien « Je prends sur le vif des mouvements que j’observe, (…) » (id., p. 27). Dans ses œuvres, la notion de gestes ou de vie en mouvement est fondamentale. Rodin peut accentuer la mimique pour révéler l’intention ou l’état d’âme d’un personnage (id., p. 63) par exemple, « Saint Jean-Baptiste » qui semble vouloir quitter son piédestal pour partir proclamer sa foi, ou « L’homme qui marche » (id., p. 55) où Rodin a supprimé la tête et les bras pour mieux se concentrer sur la marche et mettre en relief l’importance du déplacement, ou encore « L’enfant prodigue » (id., p. 36), à genoux, le dos projeté en arrière, les bras levés au ciel. Parfois, les humains peuvent paraître statiques comme « Les bourgeois de Calais » (id., p. 52) mais il n’en est rien ; chacun a une pose différente, pour exprimer sa pensée, son attente, son acceptation : « Et même dans celles de mes œuvres dont l’action est moins accusée, j’ai toujours cherché à mettre quelques indications de geste. (…) J’ai toujours essayé de rendre les sentiments intérieurs par la mobilité des muscles. » (id., p. 64)

Rodin explique sa conception de l’art en mouvement : « L’art n’existe pas sans la vie. (…) Car que serait pour nous la joie ou la douleur d’un objet inerte,… d’un bloc de pierre ? Or l’illusion de la vie s’obtient dans notre art par le bon modelé et par le mouvement. » (id., p. 64) Il peut aussi exprimer le mouvement à travers la joie de vivre : « Quatre jeunes filles viennent sur la route, au bord de cette prairie couleur de printemps. Quatre vivantes images du bonheur. » (Les Cathédrales de France, p. 25) Il veut libérer le corps de ses contraintes, dans un déséquilibre bien réfléchi, pour donner vie et élan à ses œuvres et il y réussit à merveille.

 

Le dessin et les couleurs

Rodin a toujours aimé dessiner et la quantité de dessins minutieux qu’il nous a laissés, souvent ciblés sur un élément précis, en est une preuve. Il sait décrire ce qu’il fait aussi bien par les dessins, que par les mots qui conduisent à l’essentiel : « Quelle beauté partout autour de moi sitôt que je regarde, je suis frappé de la nouveauté de ce que je vois tous les jours, soit la lumière, soit mon esprit, aux différentes heures, tout a changé, tout. » (Auguste Rodin, Correspondance, tome I, p. 158)

« Le vulgaire ne comprend rien à un résumé hardi qui passe rapidement sur les détails inutiles pour ne s’attacher qu’à la vérité de l’ensemble. » (Auguste Rodin, L’art, Entretiens réunis par Paul Gsell, p. 92).

« Il en est du dessin en art comme du style en littérature. (…) Il n’y a de bon style que celui qui se fait oublier pour concentrer sur le sujet traité, sur l’émotion rendue toute l’attention du lecteur. » (id., p. 94)

Mais il ne faut pas s’y tromper, si Rodin aime dessiner et sculpter, il ne nie pas l’importance des couleurs qu’il rend par des dégradés dans le dessin ou par l’emplacement choisi des veinures dans un marbre par exemple : « Ainsi tout dessin et tout ensemble de couleurs offrent une signification sans laquelle ils n’auraient aucune beauté. » (id., p. 97)

Rodin sait étayer sa thèse en citant de nombreux exemples à l’appui parmi des artistes célèbres comme Michel Ange, Raphaël, Rembrandt, Delacroix, Albert Dürer, Holbein, et on peut admirer la finesse d’analyse qui correspond bien à celle que l’on trouve dans ses sculptures : « (…) la sensibilité est plus extérieure chez Rubens, Velasquez, Rembrandt, par exemple, la ligne a une allure vivante avec des brusqueries et des repos et la couleur tantôt éclate en fanfares de soleil, tantôt s’atténue en sourdines de brume. » (id., p. 103)

Rodin aime autant le noir et le blanc que les couleurs autant en sculpture qu’en écriture : « Des buées pures luisent ; les maisons miroitent, comme vernissées. (…) Puis, le plan de la colline qui me fait face s’obscurcit. (…) Ce paysage, fin de journée maintenant, s’étale, voluptueux, sous un ciel d’une incomparable richesse : un ciel de Constantinople, bleu pur, avec des nuages éparpillés en étendards roses. » (Les Cathédrales de France, pp. 26 et 27) Pour lui, le noir fait ressortir la couleur et la lumière : « Cette poussière de lumière, ce scintillement de l’ombre que Rembrandt nous fait admirer, ne vous les a-t-il pas empruntés, Cathédrales ? » (id., p. 171) Il faut donc trouver un équilibre d’opposition qui mette en valeur le noir, le gris et le blanc : « Quelles belles ombres portées ! Elles n’empêchent pas de lire les corps, elles les font tourner, vibrer ! » (id., p. 122) Ces descriptions sont très minutieuses et nous ne sommes pas étonnés que Rodin puisse dessiner et sculpter avec tant de précisons, évaluant si bien l’équilibre entre les jeux d’ombre et de lumière, lui qui parle de « l’ombre nuancée qui chante » (id., p. 171).

 

La pensée

Rodin a fait une statue de la « Méditation » qui n’a ni bras ni jambe ce qui a pu surprendre et choquer certains. Il s’en explique : « Elle représente la Méditation. Voilà pourquoi elle n’a ni bras pour agir, ni jambes pour marcher. » (Auguste Rodin, L’art, Entretiens réunis par Paul Gsell, p. 150). Rodin a trouvé bras et jambes superflus parce qu’il ne voulait pas s’encombrer d’un corps humain entier qui l’aurait empêché d’aller à l’essentiel : « Mes dessins sont des éclairs de pensée ». (Auguste Rodin, Éclairs de pensée, p. 9)

Il a aussi réalisé une tête de femme intitulée « La Pensée », cette tête encapuchonnée, légèrement penchée en avant, regarde un peu vers le bas, la bouche est close, la femme semble être autre part, elle est dans ses pensées.

D’une manière plus générale, il dit : « L’art peut, en effet, susciter la pensée et le rêve (…) » (Auguste Rodin, L’art, Entretiens réunis par Paul Gsell, p. 160) pour enrichir « l’âme de l’humanité » (id., p. 171). Rodin veut donner « de nouvelles clartés intérieures pour se conduire. » (id., p. 171) car pour lui, « L’art n’est que sentiment. » (id., p. 246) Rodin s’est d’ailleurs posé des questions toute sa vie, en véritable chercheur de la vérité.

Il sait si bien observer, décrire et se passionner par ce qu’il voit, unissant le tableau qu’il voit à la pensée : « Comme une pensée qui se précise, le coteau s’éclaire. C’est le brouillard qui tombe. Le premier plan s’assombrit. Mais la vasque admirable du pays s’épanouit à mes yeux, et les nuages, sombres tout à l’heure, blanchissent. » (Les Cathédrales de France, p. 24)

Pour Rodin qui avait un cœur passionné et assoiffé de beauté, la pensée est indissociable de l’art : « L’art, c’est la plus sublime mission de l’homme puisque c’est l’exercice de la pensée qui cherche à comprendre le monde et à le faire comprendre. » (Auguste Rodin, L’art, Entretiens réunis par Paul Gsell, p. 9)

 

La poésie

Ce n’est pas un hasard si Rodin a illustré Les Fleurs du Mal de Baudelaire (en 1887) car il « respire à pleins poumons ces poèmes », « il se nourrit de ces ouvrages, (...) ». (http://www.patrick-de-bayser.com/pages/rodin.pdf, p. 1). Il rencontre le poète Rainer Maria Rilke qui fut son secrétaire pendant neuf mois en 1905 et 1906, (Auguste Rodin, Correspondance, tome II, p. 229). Il lui confie : « (…) nous avons besoin de la vérité de la poésie (…) » (Auguste Rodin, Correspondance, tome II, p. 225)

Oui, Rodin aime la poésie et ses œuvres dégagent une certaine poésie donc il n’est pas étonnant que Rodin ait aimé partager avec des poètes. Je pense par exemple à Maurice Rollinat que Rodin appréciait beaucoup. Rodin a réalisé en 1906, un bas-relief intitulé « Dernière vision », dédié à ce poète et apposé sur le chevet de l’église de Fresselines (Creuse), où ce poète a vécu de nombreuses années.

Rodin, lorsqu’il parle de l’atmosphère autour de sa propre demeure, a un langage très poétique : « Comme cette silhouette (…), échancre harmonieusement le ciel argenté et comme elle domine hardiment la jolie vallée qui se creuse au-dessous de nous. » (Auguste Rodin, L’art, Entretiens réunis par Paul Gsell, p. 16)

Les mots qu’il utilise, sont forts et dégagent une atmosphère poétique comme « Les femmes parfument l’église de leur beauté. » (Les Cathédrales de France, p. 60) Actuellement, nous parlerions de prose poétique. Ces mots entrent en parallèle avec son art, par exemple lorsqu’il parle de Saint-Cloud : « (…) une poésie vivante, infinie, palpite dans tout le décor, jetant sur les choses un voile de joie. » (id., p. 25)

 

La sensualité, l’attrait de la chair

Rodin a toujours été dominé par la sensualité, au-delà du rationnel. Certaines de ses sculptures expriment un érotisme sensuel comme « Toilette de Vénus », « La faunesse à genoux », « Femmes damnées », ou même montre ostensiblement le sexe ou l’exagère intentionnellement comme « La grande baigneuse accroupie », « L’ecclésiaste » (Gilles Néret, Auguste Rodin, Sculptures et dessins, p. 64 puis pp. 82 à 85)

Il ne peut s’empêcher de s’exclamer devant des formes suggestives : « Oh ! les épaules de celle-là, quel ravissement ! C’est une courbe d’une parfaite beauté… (…) Et regardez la gorge de celle-ci : l’adorable élégance de ce renflement : c’est une grâce presque irréelle ! Et les hanches de cette autre : quelle merveilleuse ondulation ! Quel exquis enveloppement des muscles dans la suavité de la surface ! C’est à se prosterner devant ! » (Auguste Rodin, L’art, Entretiens réunis par Paul Gsell, p. 111) ou « Ces robes, ces jupes, ces draperies sont pareilles à des feuilles retombées. » (Les Cathédrales de France, p. 122)

Rodin était en admiration devant les formes féminines et le charme qui s’en exhale. Nous ne sommes donc pas étonnés qu’il ait été un Don Juan de première classe, ne sachant pas freiner ses instincts sexuels. Pour lui, la beauté de la chair était quelque chose d’intense, d’admirable auquel il ne pouvait que succomber comme sous un charme magique, incontournable. Si nous pouvons regretter les excès de sa vie amoureuse qui ont en particulier conduit Camille Claudel à la folie, il est indéniable par ailleurs que cette sensualité lui a permis de nous donner des œuvres admirables de puissance créatrice et de vérité. Pour lui, la femme est un idéal dont il est passionné : « La femme dans le récit de la Genèse, est créée après l’homme ; la grâce suit la force. » (Les Cathédrales de France, p. 46)

Rodin est amoureux du corps humain qu’il admire sur le plan physique pour sa beauté qui lui donne des émotions intenses, émotions qu’il essaie de traduire en sculptant la pierre aussi bien que les mots : « (…) le principal souci de l’artiste doit être de façonner des musculatures vivantes. Le reste importe peu. » (Auguste Rodin, L’art, Entretiens réunis par Paul Gsell, p. 164)

La chair est aussi pour lui, jouissance et attrait des lignes pures d’une femme comme lorsqu’il décrit une de ses Vénus : « (…) voyez donc les ondulations infinies du vallonnement qui relie le ventre à la cuisse… Savourez toutes les incurvations voluptueuses de la hanche… Et maintenant, là… sur les reins, toutes ces fossettes adorables. (…) C’est de la vraie chair ! » (id., p. 52)

Rodin a soif de chair fraîche, un peu à la manière d’un ogre qui n’est jamais rassasié mais c’est dans un esprit de transcendance qui lui permet de créer des œuvres de toute beauté. Bien sûr dans sa vie concrète, il est subjugué par la beauté de la chair et passionné par les plaisirs charnels ; la multitude de ses aventures amoureuses et fugaces n’est pas là pour contredire une vérité qu’il ne cache pas.

 

L’amour de la femme

Rodin a toujours été attiré par la femme comme par exemple avec sa sculpture « Torse de femme » où l’effet minimaliste de réduction de la femme à un tronc accentue la beauté de la pureté des lignes. Sa ligne de conduite a toujours été l’amour de la femme à tous les stades de sa vie et il sait très bien l’exprimer poétiquement, avec beaucoup de justesse et de vérité : « Je ne dirai point que la femme est comme un paysage que modifie sans cesse l’inclinaison du soleil ; mais la comparaison est presque juste. La vraie jeunesse, celle de la puberté virginale, celle où le corps, plein de sève toute neuve, se rassemble dans sa svelte fierté et semble à la fois craindre et appeler l’amour, ce moment-là ne dure guère que quelques mois. Sans parler même des déformations de la maternité, la fatigue du désir et la fièvre de la passion détendent rapidement les tissus et relâchent les lignes. La jeune fille devient femme : c’est une autre sorte de beauté, admirable encore, mais cependant moins pure. » (Auguste Rodin, L’art, Entretiens réunis par Paul Gsell, pp. 111 et 112)

Rodin a aimé montrer la femme dans tous ces états, de la « Jeune fille accroupie » à la femme épanouie par exemple « Ève », de la femme enlacée pour un baiser comme dans sa sculpture « Le Printemps » à la maternité avec « La jeune mère », de la femme âgée avec « La Belle Heaumière » à « La Danaïde » où les cheveux de la femme mi-allongée, mi-accroupie forment un flot qui se mêlent à la pierre.

De même, dans ses écrits, l’amour lié au mystique est omniprésent : « Pour comprendre les Cathédrales il suffit d’être sensible au langage pathétique de ces lignes gonflées d’ombre et renforcées par la forme dégradée des contreforts unis ou ornés. Pour comprendre ces lignes tendrement modelées, suivies et caressées, il faut avoir la chance d’être amoureux. » (Les Cathédrales de France, p. 14). Il donne une dimension mystique à l’amour d’une femme qui lui permet de s’élever comme dans une cathédrale : « L’architecture de nos Cathédrales était nécessaire à la beauté de ces femmes, comme un cadre grandiose et proportionné. » (id., p. 39). Dans son enthousiasme, il utilise des mots sensuels comme « caressées », « tendrement modelées »… Ainsi avec Rodin, il arrive quelque chose d’étonnant : femme et cathédrale ne font plus qu’un, apportant toutes deux élévation et amour.

 

L’aspect philosophique

Pour Rodin, il lui est primordial de redéfinir l’art, pour mieux faire comprendre ce qu’il cherche à montrer. L’art n’est pas comme une table ou une chaise, objets de la vie courante, banaux et utiles au sens concret du terme. L’art est d’un autre domaine, celui de la pensée : « L’art, c’est la contemplation. C’est le plaisir de l’esprit qui pénètre la nature et qui y devine l’esprit dont elle est elle-même animée. » (Auguste Rodin, L’art, Entretiens réunis par Paul Gsell, p. 9)

Oui, pour Rodin, l’art vit de la force qui lui est donnée par l’artiste qui exprime des sentiments. L’art n’est pas de la reproduction à l’identique, ni de l’exagération. « L’art, c’est encore le goût. C’est, sur tous les objets que façonne un artiste, le reflet de son cœur. » (id., p. 9).

Rodin se pose de nombreuses questions de philosophe, en particulier sur notre devenir : « Nous sommes les exécuteurs inconscients de notre propre condamnation. (…) Sommes-nous, vraiment, réduits à tant de faiblesse que nous laissions, sans faire un effort pour le retenir, s’envoler le grand oiseau mystique ? » (Les Cathédrales de France, p. 61)

 

Le mystique

« Foi perdue, beauté oubliée. », nous dit Rodin. (Les Cathédrales de France, p. 64) Pour lui, le mystique a toute sa place dans la vie. Il a esquissé de nombreux croquis d’églises et de cathédrales et a pris position : « la religion est autre chose que le balbutiement d’un credo. C’est le sentiment de tout ce qui est inexpliqué et sans doute inexplicable dans le monde. C’est l’adoration d’une Force ignorée qui maintient les lois universelles, et qui conserve les types des êtres ; (…) c’est encore l’élan de notre conscience vers l’infini, l’éternité, vers la science et l’amour sans limites, promesses peut-être illusoires, mais qui, dès cette vie, font palpiter notre pensée comme si elle se sentait des ailes. En ce sens-là, je suis religieux. ». (Auguste Rodin, L’art, Entretiens réunis par Paul Gsell, p. 178)

Oui, Rodin a la notion du religieux et sait l’exprimer par des mots et par l’art ; c’est son propre credo. En sculpture, nous pouvons citer par exemple, « La Porte de l’Enfer » ou « L’enfant prodigue ». Pour lui, le mystère de la foi restera toujours entier. Rodin est un quêteur de Dieu, à la recherche de la vérité et « du contenu spirituel » (id., p. 179) de la vie. Il veut que ses œuvres soient des « sursauts de l’âme vers le royaume peut-être chimérique de la vérité et de la liberté sans bornes. » (id., p. 186)

Dans ses sculptures, Rodin s’unit au religieux d’une manière très personnelle : « La géométrie est divine. Elle nous parle au cœur, parce qu’elle est le principe général des choses. » (Les Cathédrales de France, p. 31) De plus, la femme est pour lui, liée au mystique : « Et l’élégance féminine ne trouvait-elle pas sa part dans les dentelles des clochetons et dans les plis des colonnettes ? » (id., p. 50)

Les églises sont pour Rodin, des points de repère sur la route de la vie, des endroits de halte qui aident à se ressourcer : « Les églises sont les bornes kilométriques des routes romaines de la chrétienté : les stations romaines. Elles sont belles partout. » (id., p. 35) Il fait l’éloge inconditionnel des cathédrales sous tous leurs aspects : « C’est d’une lumière surnaturelle que nous sommes illuminés ici. » (id., p. 162)

 

La vieillesse

Sa statue « La Belle Heaulmière » est représentative de la vieillesse. Elle est belle de vérité mais non de forme puisqu’elle est repoussante de laideur, vieille, squelettique. On peut penser que Rodin comme Ronsard appréciait la beauté de la femme jeune et pouvait aussi vouloir exprimer par opposition, la déchéance liée à la vieillesse, exprimant par là, la fuite du temps, la fragilité du beau, l’importance de la vérité sur la beauté. Rodin nous précise qu’il ne faut pas confondre laideur et vulgarité et que la laideur peut être belle de vérité : « Le vulgaire s’imagine volontiers que ce qu’il juge laid dans la réalité n’est pas matière artistique. Il voudrait nous interdire de représenter ce qui lui déplaît (…). » (Auguste Rodin, L’art, Entretiens réunis par Paul Gsell, p. 40)

Cette attirance pour le hideux fait partie intégrante de la beauté artistique. De nombreux artistes ont célébré la laideur comme une forme d’art. Par exemple, Baudelaire décrit sa maîtresse sous la forme d’une charogne (Charles Baudelaire, Les fleurs du mal, XXVII, Une charogne), le poète Maurice Rollinat, qui avait rencontré Rodin à Paris, parle de « sa spectrale adorée » (Maurice Rollinat, Les Névroses, L’Amante macabre). Pourquoi refuser de voir le laid, le vieux quand il est vérité alors qu’on étale la beauté odieuse quand elle est mise au service du mal, sans aucune arrière-pensée ? C’est dans un souci de vérité que Rodin exprime la vieillesse.

Et puis, pourquoi renier la vieillesse ? Elle fait partie intégrante de la vie et peut être une certaine forme de beauté : « Les vieux chênes noueux (…) disent leur bienveillance pour l’humanité qu’ils protègent de leurs branches éployées. » (Auguste Rodin, L’art, Entretiens réunis par Paul Gsell, p. 45)

 

La recherche du beau même dans la laideur

Rodin affirme avec conviction, sa notion de la beauté non pas en tant qu’idéal statique mais sensation née de l’émotion par l’observation : « La beauté, c’est le caractère et l’expression. Or, il n’y a rien dans la Nature qui ait plus de caractère que le corps humain. » (id., p. 116) Rodin aime le corps humain car « (…) c’est surtout le miroir de l’âme (…) » (id., p. 117). Le corps est l’expression de l’intériorité de l’être : « plus que sa forme si belle, la flamme intérieure qui semble l’illuminer par transparence. » (id., p. 118) Ainsi la laideur peut être belle si elle est expression de la vérité : « Ce que l’on nomme communément laideur dans la Nature peut dans l’art devenir d’une grande beauté. » (id., p. 40) De même son Balzac représenté en robe de chambre, les bras croisés fait scandale (en 1898) mais Rodin n’en démord pas. Balzac sera ainsi et le restera. Sa statue est refusée, qu’importe ! Il l’installe à Meudon.

Pour Rodin, exprimer le beau, c’est décrire le vrai et trouver le beau dans la vérité : « Est laid dans l’Art ce qui est faux, ce qui est artificiel ; ce qui cherche à être joli ou beau au lieu d’être expressif, ce qui est mièvre et précieux, ce qui sourit sans motif, (…) tout ce qui est sans âme et sans vérité, tout ce qui n’est que parade de beauté ou de grâce, tout ce qui ment. » (id., p. 44)

 

La vérité avant la beauté

Rodin veut peindre l’âme. En philosophe, il affirme : « Je vois toute la vérité et non pas seulement celle de la surface. J’accentue les lignes qui expriment le mieux l’état spirituel que j’interprète. » (id., p. 28). Lorsque Rodin obtient la commande d’une sculpture de Balzac, il ne se soucie pas de savoir si son œuvre va plaire, mais il ne pense qu’à représenter Balzac tel qu’en lui-même : « Ne me suis-je pas approché de vous un peu, maîtres grecs, maîtres gothiques, avec la statue de Balzac, dont on peut dire tout ce que l’on voudra, mais qui n’en est pas moins un pas décisif pour la sculpture de plein air ? » (Les Cathédrales de France, p. 165) Il refuse d’enjoliver Balzac car il veut faire œuvre de vérité : « Si la vérité doit mourir, mon Balzac sera mis en pièces par les générations à venir. Si la vérité est impérissable, je vous prédis que ma statue fera du chemin. » (Auguste Rodin cité par Gilles Néret, Auguste Rodin, Sculptures et dessins, p. 5) Il provoque ainsi un scandale ; les journalistes parlent d’un Balzac « difforme », «  indécent », « colossal guignol » (Paul-Jacques Lévèque-Mingam, Rodin et la Loire, p. 20). Zola défend Rodin quand les autres parlent d’une « fumisterie sans nom ». Rodin ne cède pas mais finit par installer son « Balzac » dans le parc de sa villa des Brillants à Meudon (id., p. 20).

Rodin modèle ses sujets nus avant de les vêtir, par souci de vérité. (Gilles Néret, Auguste Rodin, Sculptures et dessins, p. 12) Il veut crier la vérité même si elle est honteuse : « Laides encore l’âme et la conduite de l’homme immoral, de l’homme vicieux et criminel, de l’homme anormal qui nuit à la société ; laide, l’âme du parricide, du traître, de l’ambitieux sans scrupules. » (Auguste Rodin, L’art, Entretiens réunis par Paul Gsell, p. 40) Ou encore : « (…) c’est l’âme, le sentiment, l’idée, qu’expriment les traits d’un visage, les gestes et les actions d’un être humain, les tons d’un ciel, la ligne d’un horizon. » (id., p. 42) « L’art ne commence qu’avec la vérité intérieure. » (id., p. 248)

 

Conclusion

Travailleur acharné, passionné par son art, philosophe qui a su prendre assez de recul pour analyser ses créations, amoureux de tout ce qui est beau de sincérité, Rodin a suivi sa route d’artiste qui cherche à représenter en paroles comme en sculpture, l’âme par l’expression du corps humain, à la recherche de la vérité. Oui, c’est là le vrai chemin de la beauté. Il nous dit : «  (…) la véracité. Qu’elle leur serve de beauté ! » (Auguste Rodin, L’art, Entretiens réunis par Paul Gsell, p. 146)

Nous allons donc conclure avec un conseil de Rodin, pour vivre heureux : « Le monde ne sera heureux que quand tous les hommes auront des âmes d’artistes, c’est-à-dire quand tous prendront plaisir à leur tâche. » (id., p. 252) Sa maxime de vie pourrait être : « Aimons la vie pour l’effort (…) C’est vers la sérénité que nous devons tendre. » (id., p. 220) ; par ce message, ce que veut Rodin avant tout, c’est « enrichir l’âme humaine. » (id., p. 236)

 

Catherine RÉAULT-CROSNIER

 

 

Bibliographie :

Écrits d’Auguste Rodin utilisés :

- Auguste Rodin, Les Cathédrales de France, Librairie Armand Colin, Paris, 1921, 228 pages

- Auguste Rodin, L’Art, Entretiens réunis par Paul Gsell, Éditions Grasset, Paris, 1986, 254 pages

- Auguste Rodin, Correspondance, tomes I, II, III, Éditions du musée Rodin, Paris, 1985, 251 pages (tome I), 1986, 291 pages (tome II), 1987, 317 pages (tome III)

- Auguste Rodin, Éclairs de pensée, Écrits et entretiens sur l’art rassemblés et présentés par Augustin de Butler, Les Éditions de l’Amateur, Paris, 2003, 185 pages

 

Ouvrages concernant Auguste Rodin :

- Jacques Cassar, Dossier Camille Claudel, Éditions J’ai lu, Paris, 1987, 472 pages

- Paul-Jacques Lévèque-Mingam, Rodin et la Loire, Christian Pirot éditeur, Saint-Cyr-sur-Loire, 2007, 76 pages

- Émile Mâle, Arts et Artistes du Moyen-Âge, Armand Colin, Paris, 1928, 328 pages

- Gilles Néret, Auguste Rodin, Sculptures et dessins, Éditions Benedikt Taschen, Köln (D), 1994, 96 pages

 

Article de journal :

- La Nouvelle République du Centre-Ouest, « Camille Claudel de retour sur ses terres », édition du 9 octobre 2009, p. L11

 

Sur Internet :

http://www.musee-rodin.fr/biograp.htm, Auguste Rodin, sa vie, son œuvre (consulté le 2 octobre 2009)

http://www.patrick-de-bayser.com/pages/c_claudel.html, Camille Claudel, douze journées de la vie d’un artiste, in Le Figaro hors-série, mars 2008 (consulté le 24/02009)

http://www.patrick-de-bayser.com/pages/articles98_08/rodin.pdf, Rodin, la force du destin, in Hors Série le Spectacle du Monde, n° 8, 2001 (consulté le 24/02009)

http://www.inha.fr/spip.php?article2526, RODIN, Auguste (consulté le 24/02009)

http://www.patrimoine-de-france.org/bio005.htm, Auguste Rodin (consulté le 2 octobre 2009)

Ministère de la culture – base Palissy : Auguste Rodin, monument commémoratif à Maurice Rollinat : Dernière vision (http://www.culture.gouv.fr/public/mistral/dapapal_fr pour la consultation de la base)

http://fr.wikipedia.org/wiki/Auguste-Rodin (consulté le 2 octobre 2009)

 

 

Prise de parole de Mme Madeleine Michaud,
propriétaire du château de l’Islette jusqu’en 2009

 

Dire le beau dans la vérité. C’est ce que j’ai entendu toute la soirée. Merci à vous, chère Catherine, à votre époux, à vos amis. C’était splendide. Quelle émotion que chacun a pu partager ! C’est une vraie chance de vivre à l’Islette ; à l’Islette évidemment, on pense à ceux qui nous ont précédé c’est-à-dire Camille, Rodin. Et ces amours étaient tumultueux sans doute mais c’était d’abord quelque chose de tellement extraordinaire, c’est-à-dire que c’était leur génie qui était à l’origine de cette passion. C’était très humain et c’était très divin et je pense, en cet instant, à toute l’émotion qui m’a regagnée. J’ai senti l’âme de ces êtres exceptionnels que vous avez évoqués avec tant de talent, de chaleur, de vérité. Oui la beauté, c’est du divin. Et je pense que chacun l’a ressenti de cette manière. On ne peut pas vivre heureux sans la vérité. Merci Catherine ainsi qu’à votre époux, à vos amis.

C’était vraiment merveilleux, inoubliable. Et que la Touraine soit vraiment heureuse d’avoir des êtres comme vous pour relater des éléments aussi beaux ! J’avoue que je suis tourangelle par ma famille – quatre siècles et demi, ce n’est pas rien – donc j’aime la Touraine. J’aime la Loire et j’aime tout ce qui concerne la Touraine. Merci. Je suis heureuse de partager tous ces instants avec vous tous. J’ai pris des dépliants du château de l’Islette que mon fils a déposés hier et j’en ai quelques-uns. Vous ne serez pas déçus si vous avez l’occasion de suivre ma piste. Je vous souhaite qu’elle soit heureuse.

Mme Madeleine Michaud, le 20 août 2010, lors des 12 èmes Rencontres littéraires dans le jardin des Prébendes à Tours.

Catherine Réault-Crosnier : Ceux qui souhaitent un dépliant, peuvent aller voir Madeleine Michaud. Merci. Je donne maintenant la parole à Claude-Pierre Chauveau.

 

 

Prise de parole de M. Claude-Pierre Chauveau,
vice-président du Conseil général d’Indre-et-Loire.

 

Merci, Madame le Docteur Réault-Crosnier, Monsieur Crosnier et vos amis, d’avoir organisé cette manifestation. C’est maintenant devenu une tradition tous les étés. Vous organisez ce type de rencontres littéraires et grâce à vous, on repart avec plus de connaissance et ma foi, vous contribuez aussi à dynamiser ce quartier grâce également au comité de quartier Lakanal-Strasbourg-Prébendes.

Un petit mot pour Madame Michaud qui a très joliment dit : « Je ne suis pas la propriétaire. Je suis un passeur. » Et je trouve ce mot tout à fait admirable parce qu’on n’est pas propriétaire de pierre, on est simplement un transmetteur. On le reçoit des générations passées et on le transmet aux autres. Vous avez réussi brillamment cette transmission. J’ai vu un article dans la Nouvelle République. Cela m’a fait très plaisir parce que vous avez enfin trouvé la solution pour ce magnifique château que vous m’aviez fait visiter. Je vous invite les uns et les autres à le découvrir. Il fait partie au même titre que Rodin et Camille Claudel, de notre patrimoine. J’espère que l’an prochain, nous aurons une suite à cette rencontre avec peut-être la belle, la jolie, la douce Camille Claudel. J’espère bien que nous pourrons prolonger cette soirée. Merci encore.

 M. Claude-Pierre Chauveau, le 20 août 2010, lors des 12 èmes Rencontres littéraires dans le jardin des Prébendes à Tours.