Je ne t’ai jamais vue errer sous un drap blanc
Ni senti, sur mon front, les bulles de ton souffle...
Serait-ce qu’un brouillard trop dense m’emmitoufle
Ou que ton âme endure un sommeil accablant ?

Ma mère... Feu muet, ni fantôme, ni rêve,
Dont les lustres d’absence ont effacé la voix...
J’ai vécu des Toussaints à refleurir ta croix
Guettant, près de ton marbre, une étincelle brève...

Ma mère aux cheveux-blés, aux si jeunes appas,
Tu figes dans ton cadre ainsi que la Joconde :
Même quand mes soupirs frôlent ta tempe blonde,
Tes lèvres de papier ne s’arrondissent pas...

Et moi, vieille orpheline effeuillant son brumaire
Avec ses rires-pleurs et ses besoins d’enfant,
Je recherche la clé de ce gel étouffant
Qui, dans le bleu d’En-Haut, muselle un cœur de mère !