Ils sont jeunes, visage imberbe, cheveux hirsutes
Crados dans leurs fringues…
Là, sur le trottoir, à genoux, une chaîne ou une corde à leur cou
et au bout une pancarte :
J’AI FAIM… J’AI PAS DE BOULOT… DONNEZ MOI…

Immuables, imperturbables… ils attendent…
la meute en uniforme qui viendra les déloger,
avec la bénédiction de l’État de Droit…
À leur cou, la pancarte est toujours là !
J’AI FAIM… J’AI PAS DE BOULOT… DONNEZ MOI…
Mais l’Ordre ne sait pas lire, ne voit pas,
ces jeunes visages, ces mômes déracinés,
sans mères, sans pères, sans lieux :
Allez dans le fourgon !
La misère ça se cache !
Les déguenillés n’auront pas le plaisir de ternir
la promenade des bonnes gens !
Qu’on se le dise ! Nous sommes dans un État de Droit !

Mais la pancarte, ce bout de carton maintenu par une chaîne ou une corde,
se balade au gré des agents de l’Ordre.
J’AI FAIM… J’AI PAS DE BOULOT… DONNEZ MOI…
Ces cancres ne savent pas lire, et autiste est l’État de Droit.

Mais vous bonnes gens : prenez le temps de lire la pancarte,
maintenue par une chaîne ou par une corde, à leur cou…
Ce bout de carton qui se balade au gré des agents de l’Ordre…
Vous y lirez en lettres, faites avec des lambeaux de chair et de sang :

DE L’AMOUR… DE L’AMOUR… DONNEZ MOI…