RENCONTRE
À la hauteur du parc, elle hésite un instant
Mais le jour finissant lui laisse encore le temps
De choisir 1e parcours de la plus longue allée.
Sous la voûte des arbres, elle foule à pas
feutrés
L’épais tapis de feuilles que l’automne a
semé.
Au milieu, le ruisseau à l’eau sombre et
dormante
S’anime tout à coup du ballet des colverts,
Intrépides voiliers qui entonnent leur concert
De notes répétées de leurs voix nasillantes.
L’un d’eux déploie soudain ses ailes
empesées,
S’élance au fil de l’eau en poussant de
grands cris
De son bec menaçant, il fait fuir l’ennemi
Qui trouble le repas de sa tendre nichée.
À quelques pas de là, sur la berge opposée,
Sur un banc vermoulu, un homme seul assis
Retient sur sa poitrine de ses deux bras croisés
Quelque souvenir précieux ou un rêve évanoui
Et sa tête penchée, son regard sans repère
Ajoutent à sa posture un parfum de mystère.
Lui vient-il en mémoire quelque guerre lointaine
Des scènes de massacres impossibles à laver
Ou n’est-ce que l’image d’une femme africaine,
Beauté au corps d’ébène bien trop vite emportée.
Un simple désespoir, une vie qui se défait,
Une femme infidèle, un enfant éloigné
Ou le banal secours d’une vaine habitude,
Compagne fraternelle des jours de solitude.
Toute à ses pensées, elle sort par le goulet
Respire hors du bois, passante de hasard,
La lumière du jour et le bruit du boulevard
Et l’inconnu sur son banc, dans l’immobilité,
Gardera à jamais son mystérieux secret.
Novembre 2004
Michèle BOULESTEIX
37300 Joué-lès-Tours
Michèle BOULESTEIX au Mur de poésie de Tours 2005.
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