MADRIGAL
Si c’est aimer, Madame, et de jour et de nuit,
Rêver, songer, penser le moyen de vous plaire,
Oublier toute chose, et ne vouloir rien faire
Qu’adorer et servir la beauté qui me nuit ;
Si c’est d’aimer de suivre un bonheur qui me
fuit,
De me perdre moi-même et d’être solitaire,
Souffrir beaucoup de mal, beaucoup craindre et me
taire,
Pleurer, crier merci et m’en voir
éconduit ;
Si c’est aimer de vivre en vous plus qu’en
moi-même,
Cacher d’un front joyeux une langueur extrême,
Sentir au fond de l’âme un combat inégal,
Si cela c’est aimer, furieux je vous aime ;
Je vous aime, et sais bien que mon mal est
fatal ;
Chaud, froid, comme la fièvre amoureuse me
traite ;
Honteux, parlant à vous, de confesser mon
mal :
Le cœur le dit assez, mais la langue est muette.
Extrait de « Les Amours »
Pierre de RONSARD
(1524 - 1585)
Pierre de Ronsard est né au château de la Possonnière, en Vendômois, et mort et inhumé au prieuré de Saint-Cosme, à La Riche. Le buste de Ronsard sculpté par Delpérier se trouve au jardin des Prébendes. Il fait partie du groupe de la Pléiade et veut renouveler l’inspiration et la forme de la poésie française. Il écrit d’abord des « Odes » imitées de Pindare puis une poésie plus personnelle dans « Les Amours » pour terminer par un ton plus épique dans « Les Hymnes ». Poète de la Cour, il laissera inachevée son épopée de « La Franciade ». Son œuvre connut un oubli de deux siècles avant d’être réhabilitée par Sainte-Beuve.
Une rue de Tours porte son nom.
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