Sur la pointe des pieds
La nuit reprend ses voiles obscurs

Le parc s’ébroue,
Le soleil disserte sa sortie avec la Terre,
Les oiseaux concertent dans les arbres,
Les nichées réclament,
La vie jaillit.

Arrêts prolongés des promeneurs
Aux couleurs impertinentes des massifs fleuris,
Senteurs estivales
Exacerbées par l’humus et la rosée,
Le parc s’enivre.

Les pigeons sous le regard vide des statues
Se posent honteusement
Sur leurs membres endormis,
Les chiens épris de liberté
Dans les pelouses s’éparpillent sans déférence
Le parc réprouve.

Au milieu du bassin
Des petits navires partis au long cours chavirent.
Sur le bord,
Les capitaines en socquettes
S’esclaffent ou tombent en pleurs,
Cacophonie enfantine.

Sur un banc
En retrait sous un saule,
Les deux mains appuyées sur sa canne,
Un vieil homme ignore les amoureux à l’unisson
N’avise pas les robes charmantes des demoiselles

Ses pensées remontent le temps
Il n’y avait pas d’embarcations légères dans les bassins
D’enfants radieux dans les parcs
De pigeons effrontés
Les statues gisaient dans les remises
La guerre grondait sur terre et au ciel
Les peurs enflaient
Les jeunes années furent brèves et graves

Deux bambins accourent
Bras grands ouverts, interpellations joyeuses
L’homme s’anime
Son visage s’illumine
Le parc revit.