En Ossétie, sur la colline
au-dessus des grands ifs accrochés au vent
le soleil d’automne éclabousse d’or la pierre grise
où le passant peut lire
« un matin ils sont partis apprendre l’humanité,
ils ne sont pas revenus,
l’inhumanité les a abattus ».

Alentour, sous le silence écrasant
on entend crépiter la douloureuse morsure du chagrin,
du chagrin des femmes qui, avant d’entrer en deuil éternel étalent
sur les coteaux et l’herbe des prés
les chemises qu’ils portaient,
parce que le linge des enfants doit être blanc.
et tandis que l’hiver assiège leur cœur,
elles cueillent la dernière fleur,
celle qu’ils aimaient, la rose d’octobre
qui se cache dans la rousseur des bouleaux et des noisetiers,
la rose d’avant Noël et des jeux fraternels dans la neige.

À leurs côtés, sous les nuages,
ces longues sucettes roses qui fondent dans la liqueur amère des cassures,
les hommes,
yeux baissés sur leurs poings refermés
pensent à leurs mains vouées à l’errance,
leurs mains qui ne sauront plus travailler
qu’ils ouvrent et referment brutalement
en écrasant des crânes aux sombres pensées.

Puis ils lèvent les yeux au ciel, invoquent le soleil
en pleurant