LES DEUX VOYAGEURS
Le compère Thomas et son ami Lubin
Allaient à pied tous deux à la ville prochaine.
Thomas trouve sur son chemin
Une bourse de louis pleine ;
Il l’empoche aussitôt. Lubin, d’un air content,
Lui dit : « Pour nous la bonne
aubaine !
- Non, répond Thomas froidement :
Pour nous n’est pas bien dit : pour moi,
c’est différent. »
Lubin ne souffle plus ; mais, en quittant la
plaine,
Ils trouvent des voleurs cachés au bois voisin.
Thomas, tremblant, et non sans cause,
Dit : Nous sommes perdus ! – Non, lui
répond Lubin :
Nous, n’est pas le vrai mot ; mais toi,
c’est autre chose. »
Cela dit, il s’échappe à travers les taillis.
Immobile de peur, Thomas est bientôt pris ;
Il tire sa bourse et la donne.
Qui ne songe qu’à soi quand sa fortune est bonne,
Dans le malheur n’a point d’amis.
Extrait de « Fables, livre I »
Jean-Pierre Claris de FLORIAN
(1755 - 1794)
Ce poète, petit-neveu de VOLTAIRE, est connu pour ses comédies, ses romans moralisateurs, ses chansons, ses poèmes et surtout ses fables élégamment écrites. Il se situe à la seconde place des fabulistes français, après LA FONTAINE.
Une rue de TOURS, dans le quartier Velpeau, porte son nom.
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