"Mur de poésie de Tours" 2003 - Poètes de Touraine
LES REMPARTS DES SOUVENIRS
Combien elle aime se promener le long de cette muraille,
cette muraille où sur les vieilles pierres grises et
inébranlables d’un passé inaltérable,
elle a laissé un astérisque sur fond de parchemin,
calligraphié avec son ongle
ses mots, ses pensées les plus secrètes
afin que toujours il les retrouve.
Sur ces vieilles pierres craquelées par le temps,
elle a festonné l’alphabet, dessiné des fioritures,
bouché les fissures avec des pétales de fleurs,
des feuilles de lierre et des morceaux de filins.
Ainsi, lorsque ses pas le mèneront au hasard d’une balade,
flânant nostalgique, il fera le même geste se souvenant
que cette muraille pansera ses blessures celées à jamais
dans son cœur.
Il reconnaîtra, ému, ses dessins creusés à l’aide de son
canif et de sa brindille affûtée,
tout près des siens pour toujours se recouvrer l’un l’autre.
Sur ces vieilles pierres fissurées par le bruit des canons
assourdissants,
Elle a écrit à la gouache rouge
Comme les ailes des flamants, oiseaux divins,
des initiales, des dates et préfacé quelques vers de
poésie, douce et sans lyrisme,
une poésie sans pied ni rime,
une poésie sortie tout droit de son cœur.
Elle aime se promener le long de cette muraille
infiniment robuste aux morsures des hivers,
s’éclairant de son flambeau,
lorsque que la lune, là-haut dans le ciel la suit,
brille de son plus bel éclat comme le soleil un jour de plein
été,
se mêlant aux étoiles, joue souriante
une éblouissante partie de cache-cache.
Pensive, elle aime laisser courir doucement ses doigts
tremblants et caressants,
égarée dans ce passé inoubliable fait de rires, de larmes
et d’amour.
Le long des ces remparts lustrés par les pluies glacées
sur lesquels survivent encore de douloureux souvenirs
mais aussi de merveilleux grâce à l’enfance,
l’enfance qui ne craint pas d’aimer,
l’enfance qui quémande insatiable le droit à la tendresse.
Qui côtoierait ces pierres fortifiées
par tant de ferveur abandonnée,
prendrait le temps d’une pause pour s’y arrêter,
découvrirait ces mots :
amour, ferveur,
ardent, tendresse, amitié, fertilité, je t’aime,
ces mots, véritables joyaux.
Elle les a enveloppés dans un doux paillon
qu’elle a glissé dans une lézarde amenée par les saisons
qui ses ont succédées,
pour que les oiseaux qui ses sont multipliés,
puissent revenir inlassablement y refaire leurs nids
et perpétrer la vie sans fin,
là où sont devenues paisibles
les vieilles pierres de cette luxuriante muraille recouverte
de lierre,
de paillons, de filin et de fleurs sauvages.
Si un jour vos pas vous mènent vers les remparts des
souvenirs,
goûtez à la source qui coule fraîche et limpide,
qui se fait écarlate comme le sang qui court dans nos veines
afin que plus forts soient les battements de nos cœurs,
soient entendus par ceux qui restent sourds face à l’humanité
qui se meurt,
car « eux » n’élèveront pas de remparts des
souvenirs.
Fin 2002
Irisée Flore
Tours
E-mail : Irisee.flore@wanadoo.fr
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