"Mur de poésie de Tours" 2003 - Poètes français du présent
« LETTRE OUVERTE À MES ANCÊTRES. »
Mais il neigeait sur les silences
Et les marteaux-piqueurs guettaient l’unique avion.
Les nuages quant à eux devaient s’organiser
Pour compter les bla-bla et les répertorier.
C’était troublant et incongru : quelquefois les enfants
maquillaient leur école
Tandis-que les savants
transformaient l’eau de mer
En peinture d’illusion pour recoloriser
Couche d’ozone et prions prêts à se
déguiser.
Plus loin
Des groupements se formaient
-sortes d’associations-
Ils signaient et signaient : chacun avait son mur,
Un mur de pétitions...
À qui les adresser ?
De toute façon tous les facteurs sont passés
à la chaise électrique ! Les plus chanceux d’entre
eux on
les a fait rôtir ;
Miam-miam : Préposés au festin.
Quoi qu’il en soit,
Les riches pouvaient encore lire le journal
Mais la plupart du temps il était écrit en braille
-allez savoir pourquoi- alors ils s’en servaient comme
couverture : les petites écritures en relief grattaient la peau...
D’autres tombaient amoureux de ces nouvelles
forcément bonnes puisqu’illisibles.
Au lendemain de ce nouvel ordre, on apprit par les abeilles butineuses de webcam que les militaires étaient réquisitionnés. Ils dérègleraient calendriers et horloges puis seraient affectés aux « Grandes halles du temps » afin d’y vendre heure et date.
Tout pays refusant d’exécuter cet ordre du « Syndicat des publivores heureux » serait rayé de la carte (ce fut malheureusement le cas du Royaume-Uni, lorsque Billy Gateux, chef des gardiens, éternua près de ses côtes...).
Pour calmer les esprits :
Un Pape multifonctions avait été élu au suffrage
virtuel ; mais il s’était enfui (volatilisé en se scannant) sur
le satellite des mots doux.
À chaque solstice il fumait des poèmes.
Le tagueur officiel confirma qu’il manipulait sa console afin de se jouer du monde
In vitro et
In réality-show.
Alors les pauvres fabriquèrent
eux-même leur argent sur du papier d’Arménie : toute monnaie avait cours pourvuqu’elle soit jolie. Si un bon mot ou une phrase poétique l’ornait, cela était aussi fort apprécié. Les restaurants devinrent « Faculté de dessin » : on y mangeait de la craie pour avoir du talent !
...Comme spectacle, on allait voir des volutes de fumée.
C’est magnifique ! Qui parmi nous avait déjà vu cela ?
Personne n’aurait pu imaginer combien une volute peut
être captivante :
« Elle se forme de mille traits d’une finesse infinie
Elle virevolte et danse telle une muse envoûtée
Elle est muse envoûtante t’enivre et te séduit
Elle s’échappe en couleurs du blanc bleuté au gris...
Elle est et vit »
Mais les théâtres
n’ouvraient qu’une fois par mois car le reste du temps il s’y disputait des matchs de football de 90 secondes : Coupe du monde miniature où les vainqueurs devenaient statues en chocolat. C’était un grand honneur pour eux car ils servaient l’humanité... En effet, les self-musées étaient réserves de vitamines.
Le jour des volutes, tous les ballons étaient brûlés...
Alors voilà : il y avait chez nous -parmi tant d’autres- toutes ces choses ahurissantes,
Pour vous qui fûtes si différents.
C’était un monde étrange et fou
Mais l’était-il plus que le vôtre ?
Carole KADDOUR
E-mail : lekouddar@wanadoo.fr
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