"Mur de poésie de Tours" 2003Poètes français du passé

 

À MARCELLE

 

LE POÈTE ET LA CIGALE

 

Un poète ayant rimé,

IMPRIMÉ

Vit sa Muse dépourvue
De marraine, et presque nue :
Pas le plus petit morceau
De vers… ou de vermisseau.
Il alla crier famine
Chez une blonde voisine,
La priant de lui prêter
Son petit nom pour rimer.
(C’était une rime en elle)
- Oh ! je vous paîrai, Marcelle,
Avant l’août, foi d’animal !
Intérêt et principal. –
La voisine est très prêteuse,
C’est son plus joli défaut :
- Quoi : c’est tout ce qu’il vous faut ?
Votre Muse est bien heureuse…
Nuit et jour, à tout venant,
Rimez mon nom… Qu’il vous plaise !
Et moi j’en serai fort aise.

Voyons : chantez maintenant.

 

Extrait de « Les Amours jaunes »

 

Tristan CORBIÈRE

(1845 - 1875)

 

Né près de Morlaix, en Bretagne, de père marin, journaliste et romancier, il passe une enfance heureuse puis il s’installe à Roscoff où il fréquente des marins et écrit. Il publie « Les Amours jaunes » ; il aime écrire une poésie ironique, à partir de faits divers. Il sait aussi rire de lui. Peu connu de son vivant, ce poète « maudit de son temps » et révélé par Verlaine, a surtout écrit des poèmes dans un style original et contrasté.