"Mur de poésie de Tours" 2003Poètes d'Europe

 

DU SILENCE

 

I

Silence : c’est la voix qui se traîne, un peu lasse,
De la dame de mon Silence, à très doux pas
Effeuillant les lis blancs de son teint dans la glace ;
Convalescente à peine, et qui voit tout là-bas
Les arbres, les passants, des ponts, une rivière
Où cheminent de grands nuages de lumière,
Mais qui, trop faible encore, est prise tout à coup
D’un ennui de la vie et comme d’un dégoût
Et, -plus subtile, étant malade, -mi-brisée,
Dit : « Le bruit me fait mal ; qu’on ferme la croisée… »

 

II

Douceur du soir ! Douceur de la chambre sans lampe !
Le crépuscule est doux comme une bonne mort,
Et l’ombre lentement qui s’insinue et rampe
Se déroule en fumée au plafond. Tout s’endort.

 

Georges RODENBACH

(1855 - 1898)

 

Né à Tournai en Belgique, Georges RODENBACH vient à Paris où il rencontre les « Hydropathes ». Il a publié de nombreux recueils de poésie symboliste « Les Tristesses », « La Mer élégante », « La Jeunesse blanche », « La Vocation », « Le Rouet des brumes »... un roman « Bruges-la-morte » qui aura un franc succès. Une de ses pièces « Le Voile » sera représentée à la Comédie-Française.