Moi, je suis la pervenche.
Vers toi ma fleur se penche,
Surveille que ton pas
Soit souple et délicat.
Moi, je suis primevère,
Fragile comme verre.
Ma corolle est joyau,
Reçois-la en cadeau.
Moi, je suis violette,
Et souvent je m’inquiète
Comment les amoureux
Cueillent la vie à deux.
Moi, je suis anémone,
Et ma candeur s’étonne :
En ces bois, de nos jours,
On chasse encore à cour.
Moi, je suis le coucou,
Et mon parfum est doux,
Je te l’offre en caresse,
Comme un peu de tendresse.
Moi, je suis églantine,
Et ma robe est si fine,
Que je vois ton désir
De vouloir me cueillir.
Moi, je suis pâquerette,
Hardie et guillerette.
Je sème des diamants
Sous les pas des amants.
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Moi, je suis toute bleue,
Je en vois pas les cieux,
Mais je n’ai pas de plainte :
Je suis une jacinthe.
Je suis l’ophrys abeille,
J’y ressemble à merveille,
Mais ne me prenez pas
Malgré tous mes appas !
Moi, le coquelicot,
Tout mon sang coule à flots
De vos amours blessées,
De s’être déchirées.
Tapis blanc, tapis rose,
Les demeures m’exposent ;
Précieux comme un hymen,
Je suis le cyclamen.
Caressé par l’été,
Le ciel, un jour de fête,
Ces éclats bleus vous jette,
Me voici : le bleuet.
Nous sommes des sauvages,
Créées à votre usage.
Aimez-nous sans partage,
Cueillez-nous sans ravage,
N’ayez au cœur la rage :
Vivez comme le sage.
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