Mon Indien à moi
Il ne s’appelle pas
Porte Plume
Ni visage Blanc,

Il est visage ridé
Et c’est un petit vieux bien de chez nous.

Sa barbe
Ses longs cheveux
Ses yeux malicieux
Sa bouche rieuse,

Le dos courbé
Les épaules ratatinées,

Il marche penché
Et fait répéter.

Il a des rides
Il est si beau.

Des millions de rides
Parcourent son visage.
Plus un espace libre,
Plus une surface plate,
Seulement
Des plaines et des montagnes
Des cours d’eau asséchés
Des vallées délaissées.

Des rides !
Seulement des rides,
Elles traversent en long
Elles traversent en large
Elles se touchent
Elle se rattrapent
Elles se coupent.

C’est le plus beau paysage
Que je prends dans mes mains.

Lécher ses rides, y passer la langue
Jusqu’au plus profond des crevasses,
Y enlever le sable et les intempéries,
Les remplir d’amour et de mots doux,
Les caresser du bout des doigts
Et couvrir son visage de mes mains.

Partir dans la forêt de ses cheveux,
Monter aux arbres de sa barbe,
Glisser dans la paille de sa moustache,

Regarder ses yeux qui me regardent,
Sourire à sa bouche qui me sourit,
Tirer les poils de son nez !

Petit vieux bien de chez nous,
Vieil homme sage et rusé,
Bel Indien,
Viens que je te caresse !
Laisse-moi consoler tes rides,
Laisse-moi te les laisser,
Je les aime
Elle sont ta vie,
Elles sont ton œuvre,
Elles sont tous ceux qui t’aiment
Et te haïssent

Beau visage
Viens !
Je te protégerai, du vent et de la pluie.
Vieil homme fier qui se montre

Ton visage
C’est toi !