Que tes vers soient tristes ou gais

Entre les hommes, du cœur aux cœurs,
Tu tisses un fil d'or,

Les unissant tous par la souffrance d'aimer,

Leur donnant la volupté,

L'infatigable, la suprême, la surhumaine volupté,
Qui n'ignore ni remords ni transe,
Verse les larmes de chacun,
Est tous les hommes en un.
Oh ! les fleurs qui sont deux jours sans rosée !
Oh ! les cœurs qui sont deux jours sans aimer !
Les cœurs sans amour s'étiolent, se ferment.
Les printemps s'éveillent, mettent dans les branches
Du soleil et des chants dans tous les nids...
Oui, la Poésie rend les âmes blanches,
Insuffle la paix dans les cœurs flétris !
Je plains fort l'homme malheureux, morose,
Qui ne fréquente pas la Poésie !
Je dis que l'ignorer n'est pas vie rose,
Qu'en sa compagnie tout est ambroisie.

Je te dois, ô ma Muse bienfaitrice,
Ce que tant d'êtres n'ont pas eu :
L'amour sans calcul ni caprice,
Jamais fatigué ni déçu.
Celui qu'on garde en un sûr abri,
Le nom du Poète attendri,
Les mots embaumés dans les larmes.

Toi qui exiges tout en sacrifice
Et fais naître tout entre tes doigts,
Permets qu'ici je te bénisse
Pour les bonheurs que je te dois !