Je me souviens Grand-Mère
De tes longs cheveux gris
Qu'en tresses tu peignais,
De ton petit chignon
Qu'avec soin tu fixais,
De ta tarte odorante et sucrée,
De l'horloge du couloir au balancier de cuivre.
Grand-Mère je me souviens
De l'escalier ciré conduisant au grenier,
De la treille qui grimpait au mur de la maison,
De ses grappes de raisins dorées
Appétissantes à souhait,
De la chambre dans l'ombre sentant la giroflée.

Grand-Mère je me souviens
Des heures qui s'égrenaient au clocher de l'église,
De l'arbre à papillons que les grappes mauves
Chaque jour attiraient,
Du tilleul centenaire
Au faîte duquel souvent
Je montais m'exiler,
Je me souviens Grand-Mère
Du vieux perron de pierre
Où l'on venait s'asseoir
Lorsque tombait la nuit,
Des deux massifs ronds,
De géraniums en fleurs
Rubis étincelants
Sertis de pierres étranges.

Grand-Mère je me souviens
Des épis de blé mûrs
Qu'ensemble nous glanions,
De l'herbe ramassée
Dans ton grand tablier,
Des chardons bleu azur
En touffes dans le jardin
Sur lesquels se pressaient
De bruyantes abeilles.
Grand-Mère je me souviens
Des cailloux ramassés à chaque promenade
Pour recouvrir le sol de la cour, les allées.

Grand-Mère je me souviens
Des soirs dans la cuisine
Quand tu baissais la lampe
De porcelaine blanche
Afin d'y voir plus clair.
Alors tu préparais la tisane du soir,
Grand-Père dans son fauteuil,
Assis au coin du feu,
Faisait brûler la manche
De sa veste de toile
Sur la plaque encore chaude.
Puis tous deux assoupis,
La tête sur la poitrine,
Vous partiez un moment
Au royaume des songes.
C'était l'heure, le signal
De regagner nos lits.
Grand-Mère je me souviens…