Le service à thé de Maman
Acheté aux Nouvelles Galeries
Était ce petit service ordinaire
Bordé de rouge, en porcelaine,
Que l'on voit partout,
Avec des Japonaises peintes
Qui se tenaient dans un jardin
Empli de fleurs :
Des fleurs jaunes comme des soleils,
Des fleurs roses comme des joues d'enfant,
Des fleurs rouges comme du sang,
Des fleurs vertes... imaginaires...
Il y en avait à profusion...
À en damner un Peintre !
Au fond,
Un petit pont arqué
Passait au-dessus de la rivière d'automne
Où poussaient des iris d'eau.
Une promeneuse, en silhouette, s'y hasardait...
Écoutez le clapotis de l'eau...
À noter la présence
De lanternes ornées de glands de soie
Éclairant le jardin
Sous des fouillis de branches...
Ça et là, de rondes et tendres mousses...
Et de l'herbe qui pousse...
…

D'emblée,
Par le seul jeu de ma pensée,
J'entrais dans ce jardin secret.
Y flottais comme dans un songe. J'étais bonheur !
Tour à tour, je me prenais pour la Japonaise au bleu kimono
Ou pour la Japonaise à la robe mauve brodée de chrysanthèmes
Qui arrosait un parterre de fleurs.
La plus grande, tout de pourpre habillée,
Ne me plaisait pas
Bien qu'elle eut une ombrelle fine et compliquée
Qui faisait glisser du soleil sur sa manche...
La bleue avait ma préférence...
Elle se tenait dans la " Chambre de Thé "
Ombragée de roses cerisiers...
Cette légère habitation, aux cloisons de papier,
Ouvrait sur le jardin...
Sans remords, de la demoiselle,
Je prenais la place !
Quelle audace !
Ce n'était plus elle, c'était MOI !