LE SAUT DU TREMPLIN
Clown admirable, en vérité !
Je crois que la postérité,
Dont sans cesse l'horizon bouge,
Le reverra, sa plaie au flanc.
Il était barbouillé de blanc,
De jaune, de vert, de rouge.
Même jusqu'à Madagascar
Son nom était parvenu, car
C'était selon tous les principes
Qu'après les cercles de papier,
Sans jamais les estropier
Il traversait le rond des pipes.
De la pesanteur affranchi,
Sans y voir clair il eût franchi,
Les escaliers de Piranèse.
La lumière qui le frappait
Faisait resplendir son toupet
Comme un brasier dans la fournaise.
(…)
Enfin, de son vil échafaud,
Le clown sauta si haut, si haut,
Qu'il creva le plafond de toiles
Au son du cor et du tambour,
Et, le cœur dévoré d'amour,
Alla rouler dans les étoiles.
Extrait de "Odes funambulesques"
Théodore de BANVILLE
(1823 - 1891)
Poète français parnassien, Théodore de BANVILLE est aussi romantique par son art. Excellent prosateur, il a écrit "Souvenirs", "Esquisses parisiennes", "L'âme de Paris", "Paris vécu"… Il possédait de l'élégance, de la désinvolture, de la précision, de l'éclat et était admiré de BAUDELAIRE, de MALLARMÉ et de VERLAINE. Ses "Odes funambulesques" le rendirent célèbre. Acrobate de la rime et jongleur de mots et d'idées, il publia aussi d'autres livres dont "Améthystes", "Les Exilés", "Idylles prussiennes", "Trente-six ballades joyeuses"…
Une rue de Tours, près de Joué-lès-Tours, porte son nom.
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