LE CONDAMNÉ À MORT
Sur mon cou sans armure et sans haine, mon cou
Que ma main plus légère et grave qu'une veuve
Effleure sous mon col, sans que mon cœur s'émeuve,
Laisse tes dents poser leur sourire de loup.
O viens mon beau soleil, ô viens ma nuit d'Espagne,
Arrive dans mes yeux qui seront morts demain.
Arrive, ouvre ma porte, apporte-moi ta main,
Mène-moi loin d'ici battre notre campagne.
…
Extrait de "Le condamné à mort"
Jean GENET
(1910 - 1986)
Écrivain français né à Paris, il est l’auteur de romans "Notre-Dame-des-Fleurs", de pièces de théâtre "Les Bonnes", "Le Balcon", "Les Paravents" et de poèmes qu’il rédigea durant ses années de captivité, principalement entre 1942 et 1947. Il écrivit tout d’abord le recueil "Le condamné à mort" - composé à Fresnes en septembre 1942, puis "La Marche funèbre", "La galère", "La parade". Ses textes évoquent sa jeunesse abandonnée et délinquante et fustigent les hypocrisies du monde contemporain. Il versifie en maîtrisant la langue française d’une manière époustouflante. "Le funambule" est un texte en prose, qu’il composa et qui est le point d’orgue de son œuvre poétique. Il a connu la Touraine à l’adolescence, lors de sa détention à la colonie pénitentiaire de Mettray, et a dit ensuite : "Je n’ai jamais été aussi heureux qu’à Mettray".
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